Voici quelques nouvelles de Robert Crespin qui gère l’internat de Qachari en Bolivie et que la paroisse Saint-Paul soutient depuis 3 ans.

Chers amis,

Quelques jours de vacances m’ont permis de prendre un peu de temps, celui du repos et de la réflexion. Le repos, bien salutaire pour le corps, et la réflexion, nécessaire elle aussi, mais pour l’esprit cette fois.

Dans ma lettre, ci-joint, je vous en partage quelques fragments, en espérant qu’ils vous permettront de mieux cibler notre action et la nécessité d’adapter celle-ci aux nombreux changements que connaît le monde d’aujourd’hui.

Je vous invite, d’autre part, à ne pas rester insensibles à l’appel des enfants de Colloma, lesquels ont un grand besoin de votre solidarité.

Une fois de plus, merci de votre “écoute”!

Robert

robertcrespin@gmail.com

Lettre nº13 – juillet / 2018

Ouvrir de nouvelles voies

Chers amis,

Les transformations des conditions de vie, économiques, politiques et écologiques, qui marquent la vie des groupes les plus pauvres, exigent que K’anchay révise et adapte régulièrement les priorités de son intervention dans une région comme celle du Nord Potosí.

Comment les communautés de Qachari, de Vila Vila , de San Marcos… peuvent-elles arriver à mener une vie digne et que peut entreprendre K’anchay pour y contribuer ? Quelles sont ses possibilités concrètes d’action? Par le biais de quelles méthodes d’intervention et de travail notre association peut-elle aider les familles bénéficiaires de son appui à « mieux vivre »? Ce sont autant de questions qu’il nous faut, progressivement, tenter de résoudre. Rien de moins simple, au demeurant!

Brève analyse du contexte actuel.

La Bolivie est un pays rempli de contrastes. Le croisement économique impressionnant de certaines régions contraste avec la pauvreté déprimante de nombreux groupes de population. Dans plusieurs cas, les deux réalités sont en directe interrelation, ce qui peut constituer une origine de conflits, puisque cela exige des sacrifices précisément de la part des plus pauvres.

La compétence pour les ressources naturelles – terre, eau et végétation – apparaît chaque fois plus aiguë. Car une partie de la Bolivie (40% environ) continue de souffrir de la faim ou de la malnutrition. Et le secteur minier laisse derrière lui des paysages désolés.

La migration est toujours une réalité et la violence, la délinquance et les homicides constituent, dangereusement, une des caractéristiques les plus impressionnantes d’une société qui n’offre aux jeunes que très peu de perspectives. Et c’est dans ce contexte, chaque fois plus difficile, qu’il appartient à K’anchay d’intervenir dans les années à venir, en devenant protagoniste des processus de changement.

Comment ?

Il nous faut, impérativement, définir un nouveau lien entre notre travail et la construction sociale et la situation d’émergence provoquée par la migration, les changements climatiques, les transformations dans notre société et dans notre monde chaque fois plus compétitif et mondialisé.

En cherchant une solution – à notre mesure – à la crise complexe « socio-environnementale » : prendre soin de la nature et combattre la pauvreté.

En affirmant notre option préférentielle pour les pauvres : prendre part aux décisions qui favorisent une justice sociale et renforcer la formation des enfants et des jeunes afin qu’ils puissent exercer une influence politique de manière autonome et améliorer les conditions de vie de leurs familles, de leurs communautés.

En consolidant K’anchay dans une coopération authentique, dans un engagement à moyen et long termes, basé sur des valeurs partagées, comme la solidarité entre nous et avec les communautés avec lesquelles nous collaborons, ou encore avec d’autres organisations qui partagent notre vision du développement.

Tout un programme !

Programme que nous avons mis en place, au fil des années, et qu’il nous faut ou renforcer, revitaliser, ou rectifier, corrigé, en fonction des nouvelles conjonctures.

–  Nos Communautés Educatives Agroécologiques –

A coup sûr, les internats de K’anchay et leur projet éducatif, ont apporté un changement qualitatif  au panorama, déprimant, des années 90. Des centaines de jeunes sont encadrés, au fil des années, et une grande majorité terminent aujourd’hui leurs humanités.

Il existe une soif d’apprendre qui aboutit, dans un bon pourcentage (entre 30 et 40%), à initier des études supérieures. Plusieurs d’entre eux, optent pour des professions qui ont trait à l’agronomie, la foresterie, la préservation de l’environnement ou des ressources naturelles, le développement rural et territorial, les sciences vétérinaires ou encore l’ingénierie civile ou l’ingénierie industrielle. Et, il faut le rappeler, leurs parents n’ont, dans aucun cas, terminé leur école primaire!

Le danger de ce programme, cependant, est que l’école, le collège, les études supérieures, la professionnalisation de ces jeunes sont autant de forces qui impulsent la migration vers les aires urbaines de Bolivie… Le mécanisme de retour vers les campagnes, de réciprocité envers la famille ou l’institution qui leur ont créé cette opportunité d’étudier, est – et restera – notre défi le plus important. L’idée de transformer, à court terme, nos Communautés Éducatives Agroécologiques (internats ruraux) en Centres Éducatifs et Productifs (instituts techniques) fait actuellement l’objet de réflexions approfondies et notre internat de Mizque deviendra sans doute, dès 2019, notre premier projet pilote dans cette perspective.

Volontariat / Leadership.-

Depuis plus de dix ans, K’anchay  se consacre à former des jeunes qui, leurs études secondaires une fois terminées, s’engagent professionnellement dans l’institution ou socialement dans leur région d’origine. Nos internats sont devenus, année après année, de véritables « viviers » ou « pépinières » de ressources locales, motivées et conscientes du rôle essentiel qu’elles ont à jouer dans le développement harmonieux de leurs communautés. Plus de dix anciens élèves, hommes et femmes, travaillent actuellement comme coordinateurs, éducateurs ou responsables des aires productives dans les internats de K’anchay.  Depuis 2005, année de la première promotion de l’internat de Vila Vila, ils sont plus de cent à s’être engagés dans cette voie : plusieurs,  aujourd’hui, occupent des postes importants dans les mairies locales (conseillers communaux, départements techniques, contrôle social,…), professeurs dans les écoles ou les collèges de leur propre région. Aujourd’hui, avec votre soutien, essentiellement, nous aidons 35 de ces jeunes (trente-cinq !) qui, après avoir  réalisé leur service de Volontariat, étudient à l’Université, à l’École Normale ou dans un Institut Technique Supérieur.

L’investissement réalisé est, sans nul doute, un moyen efficace d’intervenir – à moyen ou long terme – dans une logique de développement au bénéfice des communautés de la région.  L’éducation restera l’axe central de notre intervention comme institution de service social et notre stratégie prioritaire en vue de garantir la pérennité de notre projet. Comme on l’a déjà dit, il s’agit de former des jeunes, hommes et femmes, et de leur inculquer la notion du retour, de la réciprocité, de la responsabilité et de la fidélité à un engagement initial. Une manière, en soi, de les aider à esquisser leur horizon,  de les encourager dans leurs perspectives de vie et les guider dans une dynamique d’  « aller et retour » de la solidarité.  « Tu reçois aujourd’hui pour mieux aider demain » !

Gestion des ressources naturelles / Production organique / Sécurité alimentaire.-

L’expérience et les années de travail deK’anchay dans le Nord de Potosí ont démontré qu’il est nécessaire d’approfondir les connaissances des étudiants sur les potentialités des ressources naturelles de leur région afin d’en faire un usage rationnel et durable et de les incorporer dans la production agroécologique (organique).

Devant la réalité critique de notre environnement, où de nombreuses espèces du règne végétal disparaissent, où l’érosion galopante restreint les espaces cultivables, il est important de réaliser un travail de profonde conscientisation pour générer ensuite des actions concrètes qui répondent efficacement à cette problématique. 

L’inquiétude des étudiants, de leurs parents, des familles et des communautés – qui se constituent en principaux agents de changement et de développement intégral de la région – est clairement prise en compte afin d’assumer et de renforcer la proposition agroécologique de K’anchay.  Face  à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle, qui caractérise notre zone d’intervention, il nous faut donc redoubler d’efforts afin d’obtenir une production plus importante d’aliments, de même  recourir à un usage rationnel des ressources naturelles et éliminer progressivement des modèles de consommation et de production non pérennes.

Ici encore, l’expérience nous a enseigné qu’étendre les effets engrangés dans nos internats vers les communautés multipliaient les résultats de la meilleure manière. Cette forme d’extension communautaire a permis, tout au long du processus initié dès le départ, que les enfants et les jeunes se responsabilisent d’une transformation visant à une autonomie alimentaire au niveau de la famille.

Nous sommes d’autre part convaincus qu’encourager la participation de la femme se révèle aujourd’hui fondamental, si l’on prétend atteindre un niveau de sécurité alimentaire raisonnable, surtout dans ces communautés confrontées à d’autres difficultés de tout ordre (analphabétisme, mortalité infantile, stabilité sociale, exode rural,…).  Il reste beaucoup à faire, aussi, dans le domaine de la conservation et de la récupération des sols, dans l’assistance technique qui améliore et encourage la production forestière et fruitière, dans la diversification des cultures, autant de facteurs qui justifient pleinement que K’anchay poursuive son action en « ouvrant de nouveaux chemins ».

On le voit, quand aucune autre instance n’intervient de manière durable dans ces communautés pratiquement livrées à elles-mêmes, où l’on assiste à une inéluctable tendance à poursuivre le flux migratoire du campo vers la ville, où l’urgente nécessité de chaque famille est d’assurer sa survie au quotidien, d’engendrer de meilleurs revenus qui puissent garantir une meilleure éducation de tous, K’anchay se trouve à l’aube d’une nouvelle étape, remplie de  nouveaux défis.

Avec votre aide, chers amis, nous nous proposons de les relever !

Robert Crespin,  juillet 2018

Carnets de route.

Le monde a besoin de gens passionnés, pas seulement de professionnels avertis ; le monde a besoin de gens heureux, qui prennent la décision de l’être et non qui se limitent à vivre une émotion, à percevoir un sentiment, à prolonger une relation passagère. Le bonheur se construit, se travaille; il est lent à conquérir. Ainsi en va-t-il de l’aide au développement.

Marcos, mai 2018

L’éducateur représente aujourd’hui la dernière – voire l’unique – opportunité de succès de l’élève dans son cursus scolaire. Les ébauches de réussites, pour chacun d’eux, relèvent de son entière responsabilité. Notre rôle, dans un internat, est celui d’un spécialiste ! Spécialiste du « réveil » et de la victoire sur l’engourdissement et la résignation.

Vila Vila, janvier 2018

L’internat de Colloma a besoin de vous !

La vie de l’internat de Colloma est en péril ;  il est le deuxième de nos six internats ! Il a vu le jour au début de l’année 2001. Il accueille aujourd’hui une cinquantaine d’enfants. Nous ne voudrions pas, comme nous avons dû nous résoudre à le faire à Acasio, en 2017, et à Quintapampa, au début de cette année, fermer les portes de Colloma. Car, plusieurs d’entre vous le savent, nos efforts pour remplacer Caritas Suisse, qui s’est retirée de notre zone d’intervention en 2016, se heurtent à de nombreux obstacles.

En 2018, nous pourrons encore compter, localement, sur le soutien de la municipalité de Sacaca et, de Belgique, sur l’aide d’un groupe de soutien qui assure le salaire de deux éducateurs et de la cuisinière. Mais les vivres qu’il nous faut acheter à Cochabamba, les outils et les semences pour le potager, les soins de santé, les frais de maintenance et d’administration de l’internat, ou d’accès pour assurer le suivi de l’équipe éducative et des enfants, sont autant de dépenses qu’il nous appartient de gérer…

Nous vous lançons un appel. Dans l’espoir que vous pourrez nous aider à maintenir Colloma, à financer pour le moins quelques bourses scolaires, ou le salaire du technicien agronome, ou d’intervenir dans tant de petites activités quotidiennes qui maintiennent larges les « sourires » de Colloma.

 

MERCI de nous aider à cultiver l’espérance !

Robert Crespin,  juillet 2018

robertcrespin@gmail.com

Ils ont encore plus de 400, enfants et jeunes, garçons et filles, répartis dans les six internats dont K’anchay a la charge, situés entre 3300 et 4000 mètres d’altitude. Là où l’air se raréfie et où la générosité de l’homme se mesure à la stricte nécessité du quotidien. Car chaque jour est une lutte pour survivre. C’est dans cet univers que j’évolue, depuis 1995… au rythme de votre SOLIDARITÉ !

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