JEÛNER, DE-JEÛNER

« apprécier le dé-jeûner partagé, suggère Bernard Besret, sans prélever sur la nature plus que son du ». Rien à voir avec la gloriole, la performance, rien non plus avec le goût plus ou moins morbide du sacrifice, mais par souci de sagesse. Or, sagesse rime avec modération, avec frugalité et avec discernement. Jeûner pour mieux partager, plus justement, plus dignement. Jeûner pour rejoindre le peuple des doux qui auront la terre en partage. Parce qu’ils l’auront respectée : non pas épuisée, brutalisée, comme ceux qui sont inconsidérément épris de conquête, mais pour la sauvegarder et faire en sorte qu’elle produise du fruit pour tous. Jeûner en préparant la table où l’on se retrouvera tous ensemble pour partager le pain en veillant surtout  ce que nul n’en manque. « donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour ». Pouvoir prier cette phrase en se souvenant que rien ne rend plus indigne que la faim, la faim subie de pain, de reconnaissance, de respect, de sollicitude, d’amitié… la faim suscitée par la rapacité des repus.

Le Seigneur dit par la bouche du prophète : « Le jeûne que je préfère ne consiste-t-il pas plutôt en ceci ? Partager ton pain avec l’affamé, recevoir chez toi les pauvres et les vagabonds, habiller celui que tu vois sans vêtement, et ne pas mépriser ton semblable  (Is 58,6-7). « Voilà le jeûne que Dieu approuve… : un jeûne réalisé dans l’amour du prochain et imprégné de bonté. »